Alain Finkielkraut: "La France se désintègre"
Propos recueillis par Christian Makarian, publié le
Dans son dernier livre, La Seule Exactitude, Alain Finkielkraut
trace à la machette un chemin de réflexion à travers les grands débats
qui divisent le pays. A droite? Il s'en défend. Tout en expliquant
pourquoi la gauche a perdu son hégémonie culturelle.
Dans votre livre, La Seule Exactitude
(Stock), titre emprunté à Péguy, vous cherchez à dessiller les yeux de
vos contemporains en écartant bon nombre de contrevérités. Notamment en
ce qui concerne le thème récurrent de l'"islamophobie". Où est donc l'exactitude?
Il
y a une phrase de Paul Valéry que je médite sans cesse. "Quand un homme
ou une assemblée, saisis de circonstances pressantes ou embarrassantes,
se trouvent contraints d'agir, leur délibération considère bien moins
l'état même des choses, en tant qu'il ne s'était jamais présenté
jusque-là, qu'elle ne consulte des souvenirs imaginaires." Cette
disposition spontanée de l'esprit est de nos jours aggravée par le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale. Hitler nous hante et nous incite à nous souvenir d'abord, au lieu de répondre par l'invention à l'originalité de la situation présente.
Alors même que l'antisémitisme
est devenu un code culturel dans ce que l'on appelle, hélas à juste
titre, "les territoires perdus de la République", des journalistes comme
Edwy Plenel, des sociologues comme Luc Boltanski, des historiens comme
Enzo Traverso ou Pierre Rosanvallon observent la présence de thèmes
traditionalistes et xénophobes issus de la rhétorique de l'Action
française ou du nationalisme barrésien. Et ils s'inquiètent de la réorientation contre les musulmans
d'une hostilité qui était principalement dirigée contre les juifs et le
judaïsme durant la première moitié du XXe siècle.
On se réfère à la
douloureuse histoire des juifs pour occulter purement et simplement la
nouvelle judéophobie. L'antisémitisme européen s'affaiblit à mesure que
l'antisémitisme islamiste se renforce. L'inexactitude dans laquelle nous
sommes plongés devient intolérable; il faut de toute urgence rendre le
présent présent à lui-même.
La constatation de l'antisémitisme a-t-elle constitué le point de départ de votre réflexion?
Non,
mais ce qui est particulièrement scandaleux, c'est d'invoquer la
mémoire de l'antisémitisme pour mieux nier sa forme contemporaine. Notre
époque se conçoit autre qu'elle n'est, et cet anachronisme prend aussi
de tout autres formes, qui ne sont pas moins inquiétantes. Sous le nom
ridicule d'"incivilités", la violence augmente constamment, l'insécurité
gagne; la culture ne cesse de perdre du terrain; l'école républicaine,
qui fut notre fierté, s'effondre à coups de réformes toutes plus
catastrophiques les unes que les autres.
Bref, la France se
désintègre. Elle faisait naguère encore envie, elle fait maintenant
pitié. Elle était un modèle, elle devient un repoussoir: c'est pour ne
pas connaître le destin de la France que les pays d'Europe centrale
refusent obstinément d'accepter sur leur sol des quotas permanents de
demandeurs d'asile. Ils le disent d'ailleurs explicitement. Ce constat
est déprimant, mais plus déprimante encore est l'interdiction de le
dresser. Si vous regardez les choses en face - c'est cela l'exactitude
-, vous êtes aussitôt accusé de faire le jeu du Front national et
l'automatisme antifasciste prend le pas sur l'analyse des faits. Voilà
le danger que je dénonce. Nous devons impérativement mettre nos montres à
l'heure. Il faut penser en d'autres termes. Car nous vivons un moment
inédit de notre histoire.
D'où provient cet affaissement français?
Raymond
Aron a très justement écrit: "La vanité française consiste à se
reprocher toutes les fautes, sauf la faute décisive, la paresse de
pensée." Cette paresse a pour nom aujourd'hui "mémoire". Entendons-nous
bien : je ne milite pas contre le devoir de mémoire et pour le droit à
l'oubli. La civilisation de l'Europe a été frappée à mort par les armes
d'un des peuples les plus civilisés d'Europe.
"Nous ne sommes pas sortis
de ce malheur", comme l'a dit François Furet. L'histoire, cependant, ne
prévoit pas de session de rattrapage.
Nous avons des démons,
c'est vrai. Mais nous avons aussi des ennemis, alors qu'au sortir de la
Seconde Guerre mondiale nous avions décidé de ne pas en avoir. Si nous
nous laissons accaparer par nos démons au détriment de l'attention qu'il
faut porter à l'ennemi, nous courons à la catastrophe. Notre temps ne
ressemble à aucun autre, il faut l'admettre.
Qui est cet ennemi? Contre qui sommes-nous en guerre?
Il
faut toujours se souvenir de ce propos de Julien Freund: "Ce n'est pas
nous qui désignons l'ennemi, c'est lui qui nous désigne. Et s'il veut
que nous soyons son ennemi, nous aurons beau lui faire les plus belles
protestations d'amitié, nous le serons. Et il nous empêchera même de
cultiver notre jardin." L'islamisme radical a déclaré la guerre aux
"juifs et aux croisés". Il faut en prendre acte. Cela signifie peut-être
que le multiculturalisme, dans lequel nous avons cru, est une illusion.
Nous nous attendions, avec la diversité, à l'idylle ; or nous sommes
entrés dans un climat de plus en plus dur, dans la confrontation.
Pourquoi?
L'intégration est en crise.
La France a abandonné le concept d'assimilation, jugé trop unilatéral,
elle lui a préféré le paradigme plus ouvert de l'intégration, mais
celle-ci ne fonctionne plus, au point même que certains lui substituent
l'idée de société inclusive. Comme si c'était en ne demandant plus rien à
nos hôtes que nous réussirions à établir avec eux un modus vivendi et
que le "vivre ensemble" retrouverait son harmonie perdue. Ces replis
successifs témoignent de l'extrême difficulté de faire cohabiter, à
l'intérieur d'une même communauté, des peuples qui ne partagent pas les
mêmes principes, ni les mêmes traditions, ni le même idéal.
Dans votre livre, vous écrivez que le djihad a dressé un mur entre le monde arabo-musulman et le nôtre. Ce mur traverse-t-il aussi la société française?
On ne peut tout de même pas oublier le 11 janvier. Des dessinateurs, des journalistes ont été assassinés parce qu'ils avaient offensé le prophète de l'islam;
et des juifs l'ont été parce qu'ils étaient juifs. Le peuple est
descendu dans la rue pour dire que la liberté d'expression, l'humour, la
satire étaient constitutifs de l'identité nationale et que c'était à
prendre ou à laisser. Le slogan "Je suis Charlie" a alors émergé.
Mais,
très vite, un deuxième choc s'est produit. On a constaté que tout le
monde n'était pas Charlie. Les habitants des quartiers "populaires" sont
restés chez eux. Parce que, selon eux, ces dessinateurs étaient allés
trop loin. Un clivage est apparu dans la société française et je ne
crois pas que les choses vont aller en s'arrangeant. J'ai peur que se
développe en France une espèce de sécessionnisme culturel et
territorial. Quand on dit "quartiers populaires" aujourd'hui, on entend
quartiers vidés du peuple "old school", pour reprendre l'expression récente de Michel Onfray. Est-ce à dire qu'il y aurait désormais deux peuples en France et qu'on ne peut plus les réconcilier?
N'y a-t-il pas une grande responsabilité politique dans cet état de conflictualité?
Devant
la révolution démographique que nous connaissons, il aurait fallu
réaffirmer clairement les lois de l'hospitalité. Il aurait fallu dire
haut et fort que certaines traditions, valeurs et coutumes n'étaient pas
négociables, plutôt que de rechercher sans cesse des accommodements de
moins en moins raisonnables. On aurait dû, surtout, mener, une politique
scolaire digne de ce nom. C'est à l'école que la France se présente à
tous les enfants, qui sont, comme l'a écrit Hannah Arendt, non seulement des êtres inachevés, mais aussi des nouveaux venus sur la terre.
Or
la droite et la gauche ont abandonné toute véritable ambition
éducative. Au lieu de cultiver les élèves, c'est-à-dire de les
introduire dans un monde plus vieux qu'eux, on s'efforce de les
désennuyer, on les incite à construire eux-mêmes leur propre savoir, on
abdique peu à peu toute autorité. L'école ne joue plus son rôle. Enfant
d'immigré, j'ai eu la chance de pouvoir assimiler une partie de la
culture française; cette chance est refusée aux enfants des nouvelles
générations.
La dernière réforme du collège enfonce le clou dans
le cercueil en réduisant encore la part des disciplines au profit
d'enseignements interdisciplinaires qui ne font qu'introduire dans les
têtes, à la place de la culture, la nouvelle religion civile faite de
tri sélectif et de lutte contre les discriminations. C'est comme si la
France, devenue société postnationale, postlittéraire et postculturelle,
prenait peu à peu congé d'elle-même.
La gauche et la droite sont-elles toutes deux coupables?
Oui.
La gauche, parce qu'elle a sombré dans l'égalitarisme. La droite, parce
qu'elle en est venue à concevoir l'enseignement comme une adaptation
aux exigences de l'économie.
Comment réagissez-vous devant le drame de ces centaines de milliers de migrants, privés de tous les droits dans leur pays, qui accostent sur les rives de l'Europe au péril de leur vie?
Devant
ce mouvement de population, nous sommes tous frappés de stupeur.
Malheureusement, dès qu'on essaie d'y réfléchir, on est voué à
l'opprobre. La photo du corps du petit Aylan
n'était pas seulement une image; c'était un appel à notre humanité. Ce
n'est pas une photo qui se regardait, c'est une photo qui nous
regardait. Cet appel, certains ont voulu l'entendre comme une mise en
accusation de l'Europe. Les éditorialistes, érigés en directeurs de
conscience, ont fustigé la léthargie, l'indifférence, l'égoïsme des
sociétés et des Etats du Vieux Continent. Ce procès est injuste.
Si on assiste à un tel déferlement migratoire vers l'Europe,
c'est parce que celle-ci est accueillante, à la différence de
l'Amérique - qui se protège pour des raisons de sécurité - et des Etats
du Golfe - qui sont des forteresses. Imbu jusqu'à l'ivresse de sa
générosité abstraite, le nouveau pouvoir spirituel n'accorde plus de
place dans la morale à la morale de responsabilité, c'est-à-dire au
souci des conséquences. Contrairement à ce que réclame Marine Le Pen, il
faut coûte que coûte maintenir vivant le droit d'asile.
Mais il faut savoir aussi qu'avec la nouvelle immigration la proportion
des "Je suis Charlie" ira diminuant, en France comme dans le reste de
l'Europe. Les services de renseignement allemands avertissent déjà que
le prosélytisme islamiste est très actif parmi les réfugiés qui se
pressent au pays de maman Merkel.
La cause de ce déferlement se trouve dans la violence extrême dont souffrent les populations musulmanes...
Violence
ostentatoire, qui plus est. Avec Daech, c'est comme si les nazis
avaient érigé les chambres à gaz en argu ment de propagande. Daech
attire, non tant parce qu'il ressusciterait l'idéal médiéval du califat,
mais parce qu'il coupe les têtes des chrétiens, des yézidis, des
homosexuels... Ses films publicitaires ne montrent que des massacres.
Daech
recrute ainsi en Tunisie, dans tout le monde musulman, en Europe,
jusque parmi des convertis normands. Je suis incapable d'expliquer ce
phénomène. En Syrie, la situation est d'autant plus effroyable que deux barbaries se font face.
J'entends, ici ou là, qu'il faudrait, pour vaincre Daech, envoyer des
troupes au sol. Je n'ai pas d'avis autorisé à ce sujet, mais il serait
assez incompréhensible que les Syriens fuient leur pays du fait de la
guerre et que l'Europe doive à la fois les accueillir et faire la guerre
à leur place.
Il faut une conférence internationale, et pas
seulement européenne, pour définir des conditions d'accueil, mais aussi
pour se demander comment mettre fin à ce que Jean-Luc Mélenchon lui-même
qualifie de "véritable hémorragie". On ne peut pas consentir à ce que
l'Erythrée se vide de ses habitants, à ce que les trafiquants d'êtres
humains - que la photo du petit Aylan a dû mettre en joie - fassent des
fortunes sur le dos de pauvres gens, on ne peut pas laisser la situation
se dégrader comme c'est le cas à l'heure actuelle. Cela ne peut pas
être résolu en jouant sur le masochisme moralisateur des Européens.
Les populations d'Europe centrale, ou du Danemark, sont plus rétives encore.
Avec le communisme, les pays d'Europe centrale ont subi la loi d'un
Etat étranger, en l'occurrence l'Union soviétique. Après la chute du Mur
de Berlin, ils ont retrouvé leur souveraineté; ils ne peuvent pas
consentir que celle-ci soit maintenant abandonnée au profit d'une
nouvelle instance bureaucratique, l'Union européenne. Si on ne peut pas
décider de l'admission des migrants, on cesse d'être souverain.
La
France, elle, est une nation à cran. Marseille est devenue la capitale
de l'hyperviolence, des villes comme Mulhouse, Roubaix, Tourcoing, Albi,
Carpentras deviennent méconnaissables. On y trouve de plus en plus de
rues où les femmes voilées sont majoritaires. Les Français ne voient pas
cette mutation d'un bon oeil, ils ne comprennent pas pourquoi on
qualifie de raciste leur réaction. Ils se disent que si l'intégration
est en panne, l'actuel déferlement migratoire ne pourra qu'aggraver les
tensions. C'est tout. Ce n'est pas, comme le voudraient certains, la
xénophobie qui parle, c'est le sens commun.
Une force politique exploite ce sens commun à des fins tout autres...
Nous
assistons à la naissance d'une coalition entre la gauche morale et le
grand patronat. Pour les patrons, français ou allemands, les hommes sont
inter changeables, on souhaite donc la bienvenue à ces nouveaux
arrivants qui exerceront une heureuse pression à la baisse sur les
salaires. La gauche morale préconise quant à elle l'hospitalité
inconditionnelle. Edwy Plenel fait cause commune avec Pierre Gattaz :
c'est comique. Face à cette alliance de la calculette et du violon, Marine Le Pen a raison de dire que l'immigration aujourd'hui est un problème en France,
pas une chance. Mais ce qu'elle oppose à l'étalage des bons sentiments,
ce n'est pas le sérieux de la morale politique, c'est l'inhumanité pure
et simple. Elle n'a aucun problème à renvoyer tous les persécutés chez
eux. Chacun balaie devant sa porte: cette "philosophie de concierge",
comme disait Joseph Roth, ne doit en aucun cas être la nôtre.
La gauche a-t-elle perdu son hégémonie culturelle?
Ce
que pensent les gens de gauche, qu'ils soient rouges, roses ou verts,
c'est que l'inégalité est la source de tous les maux qui rongent le
genre humain. Pour eux, il n'est pas de conflit qui ne se résume à
l'antagonisme entre les possédants et les dépossédés. Si la gauche a
perdu la partie, c'est parce que le choc des cultures n'est pas soluble
dans la question sociale. Les penseurs de gauche préfèrent se crever les
yeux plutôt que de penser à nouveaux frais.
Comment percevez-vous la centralité qu'a fini par occuper le Front national dans le paysage politique français?
Je
défends la France en tant que composante essentielle de la civilisation
européenne, je ne me reconnais donc pas du tout dans les imprécations
du souverainisme. Le Front national doit être jugé sur son programme
actuel. Il ne menace pas la démocratie, mais il est dangereusement
poutinolâtre. Il n'est plus antisémite, il n'est pas engagé dans une
croisade contre les musulmans. En même temps, il présente l'immigration
comme un tout, il refuse de faire les distinctions qui sont au fondement
de l'humanisme, et c'est à ce titre qu'il doit être combattu.
Vous êtes de plus en plus souvent classé à droite par vos détracteurs. Que répondez-vous?
On
ne me classe pas seulement à droite, on fait de moi un raciste et on
m'inscrit périodiquement sur les listes noires des "néofachos", alors
même que je soutiens, contre tous les amalgames, le travail critique que
mènent courageusement des intellectuels musulmans comme Abdennour
Bidar, Boualem Sansal,
Kamel Daoud. Face à cette violence verbale, je dispose heureusement de
la maxime popularisée par Jacques Chirac, qui ne fut pas un grand
président, mais un maître zen: "Ça m'en touche une, sans faire bouger
l'autre."
Fuente L'express
Consultar tambien en mi Blog: Polis vs Caos
Montrer que nous vivons un tournant historique, paradoxalement masqué par la référence incessante à l’Histoire; appréhender ce moment crucial dans ce qu’il a d’irréductible au répertoire de nos vicissitudes : tel est le pari de ce livre. Et l’enjeu est existentiel autant qu’intellectuel. Si, comme l’écrit François Mauriac, « l’épreuve ne tourne jamais vers nous le visage que nous attendions », il nous incombe d’être à l’heure au rendezvous et de regarder en face le visage que nous n’attendions pas.Dans une époque qui tend à se prendre pour une autre, l’exactitude devient la tâche prioritaire de la pensée.
A. F.
Fuente L'express
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Traducción personal.
En su último libro, La Exactitud,
Alain Finkielkraut traza un camino reflexivo a través de los grandes debates
que dividen el país. ¿A la derecha? Él se defiende. Al
explicar por qué la izquierda ha perdido su hegemonía cultural.
En su libro, La Exactitud (Stock),
título tomado de Péguy, Ud. intenta abrir los ojos de sus contemporáneos
mediante la difusión de muchas controversias. En
particular, con respecto al tema recurrente de la "islamofobia". ¿Dónde está la precisión?
Hay una frase de Paul Valéry sobre la que medito
incesantemente. "Cuando
un hombre o asamblea, frente a circunstancias urgentes o embarazosas, encuentra
restricciones para actuar, ya que sus deliberaciones consideran mucho menos el
mismo estado real de la situación, que nunca se había presentado hasta ahora, y
más bien consulta recuerdos imaginarios”. Esta
disposición espontánea de la mente hoy en día se ve agravada por el trauma de
la Segunda Guerra Mundial. Hitler
nos persigue y nos anima a recordar en primer lugar, en vez de responder por la
originalidad de la situación actual.
A pesar de que el antisemitismo se convirtió en un código
cultural en lo que se llama, por desgracia con razón "los territorios
perdidos de la República", periodistas como Edwy Plenel, como sociólogos
Luc Boltanski, historiadores como Enzo Traverso o
Pierre Rosanvallon observan la presencia de los temas tradicionalistas y la
retórica xenófoba de la Acción Francesa o el nacionalismo Barres. Y
se preocupan por el cambio en contra de los musulmanes, de la hostilidad que
fue dirigida principalmente contra los judíos y el judaísmo en la primera mitad
del siglo XX.
Se refiere a la dolorosa historia de los judíos de
ocultar simplemente la nueva judeofobia. El
antisemitismo europeo se está debilitando tanto como el antisemitismo islámico se
fortalece. La
inexactitud en la que estamos inmersos se vuelve intolerable; debemos
hacer con urgencia este presente, presente para nosotros mismos.
……………..
Les années trente, dit-on, sont de retour. La
droite intégriste et factieuse occupe la rue, l’ordre moral sort des
catacombes, la crise économique pousse à la recherche d’un bouc émissaire
et l’islamophobie prend le relais de l’antisémitisme. Cette
analogie historique prétend nous éclairer : elle nous aveugle. Voulant
lire ce qui arrive à la lumière de ce qui est arrivé, elle en occulte
la nouveauté inquiétante.
Montrer que nous vivons un tournant historique, paradoxalement masqué par la référence incessante à l’Histoire; appréhender ce moment crucial dans ce qu’il a d’irréductible au répertoire de nos vicissitudes : tel est le pari de ce livre. Et l’enjeu est existentiel autant qu’intellectuel. Si, comme l’écrit François Mauriac, « l’épreuve ne tourne jamais vers nous le visage que nous attendions », il nous incombe d’être à l’heure au rendezvous et de regarder en face le visage que nous n’attendions pas.Dans une époque qui tend à se prendre pour une autre, l’exactitude devient la tâche prioritaire de la pensée.
A. F.
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